Le livre des soeurs, d'Amélie Nothomb

L'histoire : Tristane naît, dans les années 70, d'un couple fusionnel, terriblement amoureux, dans lequel elle peine à trouver une place. Alors ce couple, ses parents, lui font une petite soeur, Laetitia. Elle a 5 ans à la naissance de sa cadette, et va s'en occuper pleinement. Entre les deux soeurs, dès le début, s'installe une relation d'amour fou et inconditionnel. 

Mon avis : décidément, les livres d'Amélie Nothomb sont inconstants. J'avais arrêté d'en lire il y a quelques années, mais le bon Premier sang m'a fait changer d'idée, alors j'ai aussi lu celui-là. Il a ses bons côtés, on retrouve ce qu'on aime (ou pas) chez l'autrice : ses petites manies (le pneu, un vocabulaire précieux voire parfois prétentieux, les grandes sentances, la plume d'une fluidité extraordinaire, des grandes leçons grandiloquentes). On peut aussi y voir une nothombisation qui devient un peu lourdingue, une pose, une manière maniérée, justement, de présenter l'extravagance comme sa norme à elle, une fausse candeur absurde dont l'hypocrisie peut irriter. Mais ça fait aussi partie de son charme : débérrassés de la question de la crédibilité, aussi bien de l'histoire que des personnages (elle est absente, intégralement absente), on entre dans le vif du sujet : le lien des soeurs, et ce qu'elle souhaite nous en dire. Si je n'adhère pas au fond, j'ai pris plutôt plaisir à la lecture de ce livre, à entrer dans l'intimité de ces soeurs, à les suivre sur longtemps. Et puis des petites détails, comme la relation de Tristane et sa cousine Cosette, ou le personnage délicieusement stéréotypé de sa tante Bobette m'ont bien plu, alors je ne boude pas mon plaisir. D'autant que ce livre est très court, très aéré, et que pour ma part, j'avais un peu de temps, je l'ai donc lu en moins de 24h. Un petit plaisir vite fait, comme ça, en passant, avec les imperfections de ce genre de petits plaisirs vite faits...

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Dormir était tellement obligatoire qu'elle n'y arrivait plus.

Le génie musical, comme le génie mathématique, se révèle dans l'extrême jeunesse. Il n'est jamais trop tard pour devenir écrivain, philosophe ou peintre. Il est presque toujours trop tard pour devenir un mathématicien ou un compositeur digne de ce nom. Et ce qui est vrai du génie se vérifie dans la réception : il est très vite trop tard pour accueillir la musique et les mathématiques. Ce sont des domaines qui exigent un engagement absolu.

Aucun sujet n'était tabou, sauf, curieusement, leur correspondance. Sans qu'elles aient au à se consulter sur ce point, elles savaient qu'en parler n'aurait aucun sens et peut-être même nuirait à ce phénomène supérieur. La parole et l'écrit se relaient et ne se recoupent jamais. 

Elle voulait connaître la littérature comme un alpiniste veut connaître le mont Everest. Elle voulait l'escalader par chaque face, en mesurer les abîmes et les crêtes.

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Le Livre des soeurs, Amélie Nothomb, 2022, 192 pages