Il faut tenter de vivre, d'Eric Faye

L'histoire : parfaitement présentée par la 4ème de couverture (pour une fois !) : le narrateur nous raconte sa rencontre avec Sandrine Broussard, soeur d'un ami à lui, et son histoire à elle, faite de vies multiples et tumultueuses, de petites annonces et d'arnaques, d'identité volée et de difficulté à trouver une stabilité satisfaisante.

Mon avis : Très sympa à lire (et très rapide, en 48h c'était plié !), on suit avec plaisir l'histoire de Sandrine, présentée comme une histoire vraie qui aurait été racontée en confidence au narrateur. Le personnage de Sandrine et les perosnnages secondaires sont crédibles, plutôt consistants, sensibles et forts ou faibles en alternance comme dans la vraie vie. Les choses ne s'enchaînent pas comme dans un conte de fée, mais ça n'est pas non plus le cauchemar, du coup on accroche à cette histoire qui pourrait être vraie comme on accrocherait à un feuilleton, ou à un fait divers (non-sanglant) fascinant, dont on sait qu'on est "après", qu'on connaîtra l'épilogue. L'écriture d'Eric Faye est, elle, toujours aussi agréable, fluide, simple et dense.

Vraiment un bon moment de lecture =^.^=

***

Feuilletons quelques extraits...

p.15-16 : Un soir, j'ai retrouvé Sandrine dans un café de la rue de Rome, près des voies de chemin de fer. Il faudrait que je me décide à retourner là-bas, un de ces jours, mais je me dis que les endroitspar où nous sommes passés doivent d'effacer derrière nous et qu'il est préférable de ne pas revenir sur ses pas.

p.92 : Derrière les barreaux, on a tout le temps de s'arrêter sur les détails de son passé et de les éclairer différemment selon les heures ou l'humeur. La prison devient le ventre mou de l'existence, à l'intérieur duquel tout est ruminé, comme si chaque souvenir pouvait recéler la clé de votre formidable échec, ou comme si découvrir cette clé allait vous valoir quelque circonstance atténuante et une remise de peine.

p.111 : Il faudarit accorder à chacun le droit de changer d'identité, ne serait-ce qu'une fois dans sa vie, que son casier judiciaire soit vierge ou non. J'en suis certain, la société entière s'en porterait mieux.

p.112 : S'était-elle rangée, comme elle le croyait ? Il était sans doute trop tôt pour le dire. Nos démons sont des agents dormants, jamais loin de nous : ils louent le studio d'en face.

p.171 : S'il advient un jour que les livres ne sont plus lus que sur des tablettes numériques, les écrivains pourront concevoir le "roman total", qui permettra au lecteur de choisir la vision de tel ou tel protagoniste. En cliquant sur le nom de l'un d'eux, il changera de perspective. Il découvrira l'ensemble de l'histoire vue à travers les yeux de ce personnage. Ce ne sera plus un roman ; ce sera une superposition de variations parallèles, empilées comme des feuilles d'un baklava, soit autant de romans différents déclinés autour d'une même trame, romans desquels la notion de regard sortira renforcée. 

***

Il faut tenter de vivre, Eric Faye, 2015, 176 pages

Comments

[pyrouette]

Je suis passée devant ce livre à la pauvre bibliothèque du village, sans le prendre. En lisant la 4ème de couverture et ton avis, j'ai changé d'avis, j'y retourne !