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Chez Plouf
16 février 2010

Le Portique, de Philippe Delerm

Slivre_2010_02_delerm_portiqueébastien est prof de lettres en collège depuis longtemps, il aime bien sa vie, il sait ne voir que le bon côté des choses, etc. Sauf que depuis peu, Sébastien est sujet à des malaises, ou plutôt à un malaise global et général, qui envahit sa vie...
Dans ce livre très court (187 pages), nous allons survoler en vitesse les quelques interrogations vaguement existentielles du héros, heureusement sans pleurnicheries. Je vous rassure tout de suite : à la fin, il est de nouveau lui-même, heureux de se contenter de ce qu'il a, de nouveau dans les fêtes avec les copains, dans la complicité avec les grands enfants devenus jeunes adultes, rebelle à la petite semaine dans son métier... Et content, satisfait de lui-même. Ouf. Pour un peu on serait jaloux de tant de félicité ! Faut dire que Delerm le raconte plutôt bien (sans non plus que ça relève du génie littéraire, faut pas déconner), et son narrateur glisse à la surface des choses apparemment au rythme tranquille du baladeur qui se pense libre parce qu'il ose prendre un petit chemin de traverse (rythme que l'écriture trop superficielle ne relaie pas, faisant trop de raccourcis temporels).

Je n'avais jamais lu Philippe Delerm. Il faut dire que le principe même de son mega best seller, La première Gorgée de bière, m'emmerde, et que les chansons de son fils ne m'inclinent pas à me pencher vers la famille, c'est le moins qu'on puisse dire... Bon, j'ai emprunté ça quand même, pour voir...
Si je voulais faire du mauvais esprit, je le sous-titrerais bien "Bênet-qui-s'ignore en Normandie", moralisant de loin, et comme il faut un peu de culture (il est quand même prof de lettres, bordel !), le titre fait référence aux Stoïciens, waouh rien que ça ! Cela dit, je ne suis pas convaincue que ce livre ne soit pas à lire au second degré tellement la niaiserie béate est énorme ; auquel cas c'est un excellent roman avec un message d'un bienveillant cynisme réjouissant. Mais je ne suis pas assez douée de mes neurones pour percevoir si cette subtilité est réellement contenue dans le bouquin sans des signaux plus clairs que ceux que j'ai cru/voulu percevoir... A part ça, si vous aimez la botanique et l'horticulture, vous y trouverez peut-être votre compte ; pour ma part, le catalogue Vilmorin agrémenté de la bien-pensance bobo pseudo-rebelle estampillée Education Nationale me laisse un peu somnolente...

Mais bon, ça se lit vite et plutôt avec plaisir, parce que même si ça se veut manifestement exemplaire, ça n'est pas prétentieux, juste un peu pénible les gens qui étalent ainsi leur boooonheur simple et tranquille, puis leur mal-être (rien que le mot... enfin bon !) de pauvres bourgeois bedonnants mais mélomanes... Chiant comme le vrai babillage des nombrils mollassons dépressifs sans humour. Bien entendu, je dis ça parce que je suis jalouse. J'ai la dent dure parce que dans le fond ça m'a plutôt plu, sinon je ne l'aurais pas lu en moins de 24h.


Quelques extraits :

<< Sébastien Sénécal se croyait doué pour la vie. C'était une chance, un peu injuste, comme toutes les chances. Il sentait en lui cette aptitude à vivre bien comme on se félicite d'avoir une bonne santé, sans mérite ni honte. >> p.14

<< Alors pourquoi se sentir mal soudain, comme coupé du monde ? Pourquoi cette paroi de glace entre les choses et soi ? Spasmophilie. Tétanie. Chacun des médecins qu'il avait rencontrés avait son couplet sur le mal. Certains hochaient la tête avec un air dubitatif ou même goguenard. En salle des professeurs, une collègue mariée à un disciple d'Hippocrate avait lancé à l'heure du café :
- Jacques dirait : ça c'est encore des maladies de bonne femme !
Le machisme de la remarque avait bien suscité çà et là quelques réprobations paisibles, amollies par leur prévisibilité, par le désir de passer une récréation tranquille.
[...]
Une maladie de bonne femme. Sébastien ne voyait rien d'injurieux à se laisser glisser dans un mal-être "féminin" -qu'est-ce que ça voulait dire ? L'extrême fin de siècle, malgré toutes les ouvertures, toutes les confusions, tous les mélanges, pouvait laisser ainsi passer quelques clichés bien lourds, reflets d'une société lointaine -il est vrai qu'à Plainville, au coeur de la Normandie, on avait souvent le sentiment de vivre encore à l'époque de Balzac ou de Stendhal.
Psychosomatique. Pour beaucoup de gens, la spasmophilie relevait de cette épithète condescendante, et même si on ajoutait que psychosomatique ne signifiait pas imaginaire, le discrédit était jeté. Une maladie pour femme, ou bien une maladie féminine, c'est-à-dire pour les gens compliqués, insatisfaits, fragiles.
[...]
Alors ? Alors ce ridicule d'être tout à fait mal sans vraie cause, hypocondriaque ou presque. >> p. 15 à 17

<< On ne possède pas un jardin. On l'accompagne, on le devient, on l'abandonne. >> p.150

Il s'adresse à un inspecteur qui vient de lui faire l'article pour les nouveaux programmes << Votre soi-disante réforme s'appuie sur un constat d'échec. Ce sentiment d'échec, je ne l'ai jamais éprouvé depuis vingt ans, et je ne l'éprouverai que si l'on me contraint à épouser vos programmes et vos techniques bureaucratiques et mortifères. On ne peut être un bon prof de lettres qu'avec la liberté d'être soi. >> p.162
Puis il lit un texte assez nul qu'il présente comme exemplaire... Second degré ?... Distanciation énorme entre auteur et narrateur ?... Je n'en sais rien.

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Commentaires
N
J'ai lu La première gorgée de bière par hasard (quelqu'un me l'a offert) et j'ai eu exactement le même sentiment que toi à la suite de ce livre-ci. Rien de transcendant qustion écriture et à me demander ce que cet auteur veut vraiment faire. Pas déagréable, mais pas inoubliable non plus, et même pas envie de le relire. <br /> Donc je pense que Le portique ne rejoindra pas ma bibliothèque.
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