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Chez Plouf
18 février 2010

Hommes entre eux, de Jean-Paul Dubois

Hlivre_2010_02_dubois_hommes_entre_euxasselbank est malade, du même mal qui a emporté son père dans d'atroces souffrances. Sa femme Anna s'est barrée, et il ne dépasse pas son absence. Un jour, il a reçu d'elle une lettre venant d'une petite ville de l'Ontario. Sans autre indice, il décide de prendre l'avion.
Paterson est un rude gars du froid, un chasseur avant tout, conscient, sauvage et minutieux. Il vit seul dans une maison rouge très isolée. Dans sa chambre il y a une photo d'Anna.

Tout le monde m'avait dit que c'était le Dubois qu'ils aimaient le moins... Je m'attendais donc à une certaine petite déception, mais il n'en a rien été. Enfin si, mais seulement dans les 2 dernières pages, dont j'ai trouvé la chute artificielle, surnuméraire, inutile. Pourtant, la superbe couverture m'avait prévenue que ça ne finirait pas bien...
Le face-à-face de ces deux hommes presque en cage dans une maison isolée dans une tempête de neige d'une rare violence est formidable, presque léger alors qu'on sent bien flotter dans l'air comme une tension impalpable, quelque chose d'à la fois sainement viril et profondément détraqué. Mais ça flotte dans l'air, sans plus, on se demande si on ne se fait pas des illusions. Jean-Paul Dubois est décidément très fort, très très fort. Il sait comme personne rendre trois fois rien passionnant. Il sait aussi, et c'est encore plus rare, donner cette impression permanente du temps qui passe, inexorablement, du temps qui se déroule comme un tapis, imperturbable quoi qu'il arrive, régulier, inaltérable. Chez lui, pas de temps suspendu, pas d'évènement qui justifie une pause, juste le temps qui avance, avance, avance, et les hommes qui font ce qu'ils peuvent sur ce tapis en mouvement continuel. Et puis on croise, comme toujours, une galerie de portraits sans concession ciselés à la hache et pourtant d'une précision et d'un réalisme remarquables.

Bref : je ne m'en lasse pas ! Et ce livre-ci serait peut-être mon préféré de ceux que j'ai lus de lui, par son ambiance, son absence de péripéties, son point de départ, ne serait-ce que je n'aime pas la fin, les 2 dernières pages qui arrivent comme un cheveu sur la soupe. Ce dérangement est peut-être la part nécessaire, le dénouement de l'impression. Mais il rassure trop le lecteur ; j'aurais, je crois, préféré rester dans le flou, dans une fin pas claire, dans le doute de mon impression de malaise... Ce sera mon seul bémol.


Quelques extraits...

Paterson a été greffé du coeur. Et je n'avais jamais pensé à ça :
<< Alors là oui, il repensait à tout ça. Au coeur de Coutu. Mais aussi au sien, qui lui avait donné vie, qu'on avait enlevé, sans doute jeté, et dont personne ne lui avait jamais reparlé. >> p.33

<< Les Indiens disent que la seule chose que l'on ait à craindre pendant le blizzard, c'est que le vent soulève la mauvaise part que chacun porte en soi et que, lorsque tout s'apaise, apparaisse à la lumière ce que l'on a parfois essayé d'enfouir tout au long d'une vie.>> p.193

<< Psychologiser les problèmes était, pour Anna, la manière la plus élégante de mentir. Ou, du moins, de ne pas dire la vérité. Classer tel ou tel questionnement dans un répertoire de névroses permettait, en réalité, de clore la discussion avant même de l'avoir entamée. >> p.210

<< Baiser - il laissait volontiers l'amour aux volontaires - n'avait d'autre signification que d'arracher à l'existence un peu de plaisir. Prélever sa part. Il fallait simplement s'incrlure dans le miracle de la vie qui faisait que nous étions là, les uns parmi les autres, à espérer que les jours s'ajoutent aux jours, pareils à ces animaux de la forêt, inquiets, aux aguets de ce qui est en train d'advenir.
[...]
En tout cas, au lit, en compagnie de l'une ou de l'autre, il s'était souvent senti seul. Il n'était pas facile au début de le reconnaître, de se dire qu'il passait à côté de cette relation fusionnelle que les autres appelaient la vraie vie et célébraient avec, en bouche et dans le coeur, une foi ravageuse, publique et communicative. >> p. 265 & 266

<< Un petit mensonge de confort. Mentir ne le gênait pas. C'était une nécessité de l'existence, ni plus ni moins. Le lubrifiant indispensable qui permettait aux humains de se fréquenter et de se supporter temporairement. Sans la viscosité du mensonge, le monde aurait eu vite fait de se gripper. >> p.293



Un livre paisible et sauvage, plein d'espoir et très cynique : contrasté.


=^.^=

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Commentaires
D
Tiens marrant, ce livre avait fait polémique dans mon comité romans il y a 1 an .... c'était tout l'un ou tout l'autre ..... on aime, on déteste. J'avais plutôt aimé, même si j'avais trouvé quelques longueurs. Mais le huit-clos est assez bien fichu.
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L
Hum, ça a l'air intéressant, mais trop glauque pour moi en ce moment ...<br /> Je suis aussi passée chez Meuh ... la super vache pour lire son article, et merci pour tes précisions éclairantes ...<br /> Bye !
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