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Chez Plouf
2 décembre 2015

L'Evangile selon Pilate, d'Eric-Emmanuel Schmitt

livre_eric-emmanuel schmitt_l evangile selon pilate_2015 12

L'histoire : la première partie relate le point de vue de Yéchoua, qui attend les hommes qui viendront le chercher pour l'emmener à la crucifixion, il revient sur son histoire singulière ; la deuxième partie est la suite de l'histoire vue par Pilate, en particulier le mystère agaçant et résistant de la résurection ; enfin la dernière partie est composée d'extraits du journal d'Eric-Emmanuel Schmitt autour de l'écriture et des premières aventures de ce roman.

 

Mon avis : un point de vue très intéressant, cohérent, documenté, intelligent, construit et sensible, extrêmement moderne certes mais pourquoi pas dans le fond ? sur la vie de Yéchoua (Jésus si on traduit son nom, mais j'avoue que je n'aime pas des masses les traductions de noms propres, et j'ai beaucoup apprécié ici la conservation des noms araméens). Et si Yéchoua avait trouvé de quelle manière Dieu est en chacun de nous ? Et compris par là comment le dire, porter cette parole ? 

J'ai probablement apprécié ce point de vue singulier aussi parce que ma propre croyance est proche de celle-là concernant l'existence éventuelle d'un Dieu, et que je n'ai jamais remis en cause la réalité historique des dons exceptionnels de Yéchoua. 

... En fait, je n'ai pas très envie de m'étendre plus sur le sujet ici, lisez ce livre si le sujet vous intéresse, quelle que soit la manière dont il vous intéresse, c'est un vrai point de vue construit et passionnant, la lecture en est fluide, et très accessible même sans une importante culture biblique préalable.

 

***

Feuilletons ensemble quelques extraits...

 

Grandir fut rapetisser. grandir fut une chute. Je n'appris la condition d'adulte que par le sblessures, les violences, les compromis et les désillusions. L'univers se désenchanta.

 

Même en s'appliquant, un cul-de-jatte ne sautera pas un mur.

 

Comme toi, Mochèh, devant le mal, je souffre, cependant la souffrance n'est pas une occasion de haïr mais une occasion d'aimer.

 

C'est la seule chose que nous apprend la mort : qu'il est urgent d'aimer.

 

J'avais appliqué là un autre enseignements de mes voyages au puits sans fond : aimer l'autre au point de l'accepter jusque dans sa bêtise. Répondre à l'agression par l'agression, oeil pour oeil, dent pour dent, n'avait pour résultat que de multiplier le mal, et pis, de le légitimer. Répondre à l'agression par l'amour, c'était violenter la violence [...]

 

Je ne détiens aucun pouvoir, sauf celui, éventuellement, d'aider à ouvrir la porte qui, au fond de chacun, conduit à Dieu.

 

Mais ce n'est pas parce qu'on manque de crocs qu'on n'a plus d'appétit.

 

Qu'est-ce qu'une surprise ? Un évènement inattendu qui provoque en nous de la peine ou de la joie ; c'est bref, une surprise ; on s'en remet toujours, qu'elle soit bonne ou mauvaise. Mais comment appeler une surprise sans fin ? Une flèche qui vous fige dans la perplexité ?

 

C'est très protecteur de dire du mal de soi, surtout si l'on sait trouver les bonnes formules : elles vous habillent.

 

- On ne dit jamais rien parce qu'on parle tout le temps.

 

La seule attitude intellectuelle honnête concernant l'existence de Dieu ou du Christ consiste à dire : "Je ne sais pas." L'agnosticisme doit demeurer notre base, à tous. Lorsque l'on dit "Je crois", on ne dit pas "Je sais". Ce que je crois n'est pas ce que je sais. Lorsque l'on dit "Je ne crois pas", on ne dit pas non plus "Je sais que ça n'est pas". Dans l'ordre de la vérité, ne pas croire à quelque chose ne donne aucun mérite supplémentaire. restons humbles et mesurés. Une croyance athée ou une croyance  chrétienne demeurent des croyances. Jamais une science. Et chacune mérite le respect qu'on doit adresser à toute conviction.

 

***

L'Evangile selon Pilate, Eric-Emmanuel Schmitt, 2000, 200 pages en version numérique, 241 pages en version poche, Grand Prix des lectrices ELLE 2001

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Commentaires
P
Je ne suis pas certaine de le lire mais j'aime beaucoup les extraits.
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E
J'avais fait une critique (enfin, c'est pas bien grand mot) de ce livre il y a quelques années, que j'ai retrouvée, ça donnait ça :<br /> <br /> A priori Schmitt est un écrivain qui m’agace, un auteur illuminé à l’instar d’un Paolo Coelho, quil veut apporter la bonne parole à ses lecteurs, lui qui a eu la révélation une nuit dans le désert. Ces textes plein de bons sentiments m’irritent voire m’effraient un peu en général. Et les romans racontant la vie de Jésus, même s’ils sont très bien écrits comme La Dernière tentation de Jésus de Níkos Kazantzákis, me gênent un peu.<br /> <br /> Et les paroles pleines de bonté et d’amour ont le don de me mettre mal à l’aise profondément.<br /> <br /> <br /> <br /> Le roman de Schmitt est divisé en deux récits et se termine par une sorte de journal de bord de l’écrivain.<br /> <br /> <br /> <br /> Le premier récit est un prologue intitulé « Confession d’un condamné à mort le soir de son arrestation ». Il est rédigé à la première personne du singulier et retrace les trente premières années de la vie de Jésus. En effet, les textes bibliques sont quasi silencieux sur l’enfance et l’adolescence du Christ. EES se penche donc sur la question et choisit de romancer la vie de Jésus jusqu’à son arrestation. C’est ainsi que Yéchoua (nom araméen de Jésus, ça fait plus authentique…), simple fils de charpentier et prédestiné à reprendre l’affaire familiale, sent dès son plus jeune âge qu’il « n’est pas fait pour le cours ordinaire de la vie ». S’il se prend pour une sorte de sage écoutant les malheurs des habitants de son village dans un premier temps, le cours de l’existence de Yéchoua va être bouleversé par les rencontres qu’il va faire. En effet, c’est Yohanân le Plongeur qui, le premier, le reconnaît comme l’élu de Dieu. Refusant d’être le Messie annoncé par les textes, Yéchoua s’enfuit au désert pendant quarante jours au cours desquels il aura une révélation. « Il y a en moi plus que moi. Il y a en moi un être qui n’est pas moi et qui cependant ne m’est pas étranger. Il y a en moi un fond qui me dépasse et me constitue, un tout inconnu d’où part toute connaissance, une immensité incompréhensible qui rend possible toute compréhension, une unité dont je dérive, un Père dont je suis le Fils ».<br /> <br /> <br /> <br /> Puis, Yéchoua revient, il se met alors à guérir les malades, à accomplir des miracles et à prêcher la bonne parole. Rejeté par sa propre famille, douze hommes vont choisir de tout quitter pour le suivre sur les routes de Galilée. Mais Yéchoua est avant tout un homme. Et en tant qu’homme, il éprouve de la peur quant à sa destinée (car il sait qu’il doit passer par la mort) et il doute : est-ce vraiment lui le Messie ? Mouais…<br /> <br /> <br /> <br /> Le second récit, « l’évangile selon Pilate » est également rédigé à la première personne du singulier et sous la forme épistolaire. L’histoire se situe postérieurement à la mort de Yéchoua. On vient rapporter à Ponce Pilate que le corps de Yéchoua a disparu. L’entourage de Yéchoua proclame qu’il est ressuscité. Pour Pilate, une résurrection est inconcevable. Pilate s’interroge: qui a bien pu voler le corps de Yéchoua et dans quel but ? Il est vrai que Jésus est un homme avant tout : c’est sa résurrection qui lui confère un caractère divin. En bref, selon Schmitt, rien ne le prédestinait à devenir l'Elu.. Aussi, on ne se pose jamais la question de savoir si les guérisons ou les miracles étaient véritablement des manifestations divines ou si Jésus avait tout simplement quelques notions de médecine ou de chimie (pour changer l’eau en vin).<br /> <br /> <br /> <br /> Schmitt se pose la question de la traitrise de Judas. Était-il bien traitre ? Mais c’est beaucoup de masturbation intellectuelle pour des personnes dont on ne sait si elles ont existé, et dont on ne peut connaitre ni le sentiments, ni les motivations. Les interrogations sur les fondements du christianisme et la manière dont ils nous été rapportés mérite mieux que ce livre. <br /> <br /> L’auteur émet des hypothèses : Judas ne serait pas le traître que l’on croit mais au contraire le plus fidèle des disciples de Jésus, qui par amour pour lui, accepterait de le dénoncer pour qu’il pût accomplir son destin ! De même, la femme de Ponce Pilate aurait été présente lors de la crucifixion et de la mise au tombeau de Jésus. C’est parce qu’elle a cru en lui et en sa résurrection que son époux mène l’enquête sur le mystère de la disparition du corps.<br /> <br /> <br /> <br /> La troisième partie est pour moi la plus intéressant : intitulée "journal d'un roman volé" , elle nous permet de connaître le travail de l’écrivain.<br /> <br /> <br /> <br /> Mais, tout de même, la version romancée de l'évangile façon Schmitt n'est que pure supposition.<br /> <br /> <br /> <br /> Moi j’aime bien cet extrait : « Depuis quelques années, un certain Yéchoua, un rabbin contestataire, fait parler de lui en Judée. Au départ, l’homme n’avait pas grand-chose pour lui : un physique passe-partout, un accent de bouseux galiléen, et surtout, il venait de Nazareth, le trou du cul du monde. Normalement, cela aurait dû suffire à l’empêcher de devenir populaire ; mais ses discours toujours un peu mystérieux et décalés, ses phrases à l’emporte-pièce, ses fables orientales tantôt douces, tantôt violentes, son attitude complaisante avec les femmes, bref, en un mot, sa bizarrerie, lui a gagné des suffrages ».
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