Le voisin, de Tatiana de Rosnay

L'histoire : Colombe, femme discrète et "transparente" malgré sa haute taille, est "nègre" à mi-temps pour les éditions de l'Etain. On la trouve, au début du roman, en train de choisir un nouvel appartement à louer pour elle et sa famille (un mari en "voyage d'affaire" plus souvent qu'à son tour, 2 garçons de 11 ans, Balthazar et Oscar) auprès d'un propriétaire qui souhaite louer à "quelqu'un de bien". Elle est parfaite dans ce rôle. Dès son emménagement, quelque chose ne va pas : le bruit nocturne. Toutes les nuits, à partir de 3h du matin, du bruit la réveille, venant de l'étage au-dessus... Encore et encore, nuit après nuit. Jusqu'à sérieusement saccager sa vie bien rangée...

Mon avis : un excellent roman ! Au début, tous ces bruits (Rolling Stones à fond, bruits de pas, etc.) font s'interroger sur la réalité des choses, tout correspond tellement bien à la vie de Colombe... Et puis c'est étrange que ça ne se produise jamais quand Stéphane, le mari, est là... Jusqu'assez loin dans le livre, on compatis à ses angoisses, mais on balance toujours entre "c'est la réalité" et "elle perd la tête"... D'ailleurs, il n'y a pas que cette interrogation-là qui s'insinue sans cesse. Colombe va-t-elle péter un câble ? Dans quelle direction ? Etc.

La fin est formidable, fine et bien saisie. Quand on voit tourner les choses, on s'inquiète de la tournure de la suite, bref : on continue à se faire allègrement balader par l'auteure ! Tout peut arriver, tout est possible,  ce roman sur la difficulté d'être soi, en forme d'interrogation sur le rôle des épreuves, le choix de ce qu'on en fait, est un vrai petit vent de fraîcheur,en même temps qu'un petit moment d'angoisse.

En bref : un livre vraiment très agréable à lire, où on retrouve la plume acérée, le sens de la formule et la façon simple et élégante de nous mener par les émotions, propres à Tatiana de Rosnay.

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Feuilletons ensemble quelques extraits :

Assise à son bureau, Colombe n'a qu'une envie : dormir. Elle bâille tellement que ses tympans couinent.

Depuis plusieurs jours, elle n'a pas fait le ménage. Repasser, nettoyer, aspirer, ranger, mettre des machines en route, changer les draps. [...] Pour la première fois, elle trouve chaque geste rebutant. Dire qu'elle passe ses journées à ça. Depuis douze ans. Un baai à la main, Colombe ressent un dégoût, une lassitude. Sa vie s'étire devant elle, morne, plate, sans relief. Une série grise de joies calmes, de tranquillité ankylosée.Un bonheur engourdi, embourbé dans le rituel du quotidien. [...]

Et si elle partait ? Partir. S'en aller. Se casser,comme dirane tles garçons. [...] Plus de repas à préparer, de provisions à acheter, de sols à lessiver, de chemises à repasser, de chaussettes à repriser, de leçons à faire réciter. Plus de "qu'est-ce qu'on mange ce soir ?". Plus de "Balthazar m'a piqué mes écouteurs, il veut pas me les rendre". Plus de "Coco, mon pantalon gris est toujours chez le teinturier ?". Partir, oui, mais comment ? [...] Partir, oui, mais pour aller où ? que veut-elle fuir ? Ses enfants, son mari ? Son travail ? Son voisin ? Ridicule. Elle a choisi cette vie, cet appartement. Elle est heureuse, vraiment. Quelle idée, de vouloir penser le contraire, quelle idée idiote. Penchée sur la serpillière, elle frotte le carrelage de toutes ses forces.

Peut-être que c'est ça, le mariage, finalement. Devenir un meuble, un meuble qu'on voit tous les jours. Un meuble qu'on ne voit plus.

Mais l'inspecteur, un homme expérimenté, un homme qui en a vu d'autres, sait que souvent les petites dames inoffensives peuvent se révéler ls pires criminelles.

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2000, 178 pages (en version numérique), 248 à 288 pages (selon les versions papier)

Comments

[pyrouette]

Je me demande si j'ai lu ce livre.... C'est grave Docteur ? Je vais allez faire un tour à la médiathèque du village. Bises

[angele en vrac]

Je l'ai lu il y a quelques années, ça m'a donné envie de le relire, que tu en parles! D'autant plus qu'avec mon cerveau passoire, je ne me souviens plus comment ça finit (pour ça, c'est pratique:) )

[Theomaluanne]

Ça donne envie...Valérie