L'histoire : suite à une altercation avec sa prof de français dans un collège de Paris, Sabine, 11 ans, va décider de fuir le collège où elle s'ennuie, où elle est si malmenée. Pour éviter aussi de voir sa mère, dont elle a honte, rencontrer cette prof. Ce matin-là, donc, elle quitte l'appartement de Montreuil comme si de rien n'était, mais file passer sa journée dans Paris au lieu de se rendre en cours... Une journée décisive.

Mon avis : un livre très sympathique. Des journées décisives, importantes, qui font à la fois prendre conscience et réchauffent le coeur, on en a tous connu. Celle de Sabine ici est très concentrée, forte, extrême dans tous les sens : une claque mentale violente et un éblouissement merveilleux. De quoi changer définitivement le regard sur le monde à l'âge des questionnements et des formations. La peinture qui y est faite de l'école et de notre société sont assez intéressants, même si j'ai trouvé que ça n'allait pas forcément assez loin dans sa logique et que la fin, quoique très plaisante à lire pour le coeur, était un peu trop proprette sur elle sur certains plans, notamment celui des pensées de la prof de français... hum, mon oeil quoi ; cela dit la vraisemblance n'est pas une nécessité majeure, et pourtant, ça reste quand même crédible, tout ça, un peu too much pour être tout ensemble, mais ça tient debout.

L'écriture est agréable, parfois très factuelle, parfois plus intime, mais toujours un peu distanciée, un peu comme anesthésiée, comme Sabine finalement. Avec des petites pointes poétiques toutes simples, très agréables, sans grande envolée lyrique prétentieuse.

En bref : un très joli petit livre sensible, doux et délicat, vite lu, sur un âge délicat qui ne devient beau que quand on n'y est plus.

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Feuilletons ensemble quelques extraits...

page 63 : Ici, dans ce quartier déjà éloigné, elle n' aplus de rencontres à craindre, ne croise que des inconnus. Personne ne fait attention à elle. On dirait qu'elle est invisible. On dirait que, maintenant, elle a des ailes.

page 101 : Une forêt.
De nouveau, la magie du mot. Et si c'était ça, la poésie ? Ce trouble pour un mot. Ce bonheur à le retrouver. A le savourer.

page 108 : Cette étrangeté dans l'église... La pénombre, peut-être, mais aussi le mystère de ce silence habité de murmures, la douceur de l'écho de spas multipliés sous les hautes voûtes. La singularité de cette lente foule de visiteurs, muets ou chuchotants, passant comme des ombres entre les piliers géants, comme des nains dans une forêt. Et, plus encore, la présence immobile, intrigante, de tous ceux-là, assis ou agenouillés à la façon des statues, qui regardent fixement devant eux, ou, tête baissée, ensevelis dans leurs pensées, semblent avoir disparu du monde.

page 160 : "Tu sais, darling, reprend Kate après un silence, pour bien travailler, il faut être heureuse. Il faut avoir des amis avec qui parler de ce qui t'intéresse..."

page 162 : Pourquoi est-ce si facile de parler à ceux qu'on ne connaît pas alors que les gens de notre vie quotidienne sont pour nous comme des portes fermées ?

pages 211-212 : Les tableaux sont des poèmes, se rappelle la petite, et les poèmes des tableaux. Des émotions de la vie, comme disait John, des petits éclats de vie que le peintre ou le poète ont su exprimer et qui donnent un sens à leur existence. Et nous, ajoutait-il, quand nous lisons ces poèmes et quand nous regardons ces tableaux, ce sont nos émotions à nous, nos éclats de vie à nous que nous retrouvons, et nous sommes heureux. C'est tout simple : l'art, c'est rendre belles même les choses tristes et permettre aux autres de les voir.

page 214 : Elle sent surtout qu'elle a en elle cette petite flamme qui permet de penser, d'espérer, d'aimer.

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Un jour par la forêt, Marie Sizun, 2013, 215 pages

Un jour par la forêt, de Marie Sizun

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