Le sujet : les enfants omnipotents, qui profitent d'une trop grande permissivité parentale pour devenir tyranniques, exigent au-delà du supportable pour l'entourage, dont les quatre volontés font le mode de vie et le rythme familial. Une première partie sur l'identification, les signes reconnaissables de la tyrannie infantile, les dégâts sur la famille, de nombreux exemples. Et après, bien entendu, des conseils et exemples pour comprendre comment y faire face, et comment adopter la réaction appropriée (réaction non-standardisée, donc adaptable à chaque famille, c'est simplement le positionnement éducatif qui est explicité -très bien d'ailleurs).

Mon avis : j'ai choisi ce livre pour des raisons particulières. Dans le milieu dans lequel j'évolue, il a très mauvaise presse, et ça faisait partie des raisons qui m'intéressaient. Bien m'en a pris ! Comme on y trouve un peu toujours ce qu'on a envie d'y lire, dans ce genre de livre (enfin je ne parle pas de livres de quelques illuminés médiatiques où décidément on ne trouve rien de potable !), j'y ai trouvé des choses très intéressantes à mon goût. Le refus de la psychologisation systématique, le refus de la victimisation systématique (un enfant chouine, allez hop ! "pauvre petit qui manque de câlins/ d'amour/ d'attention" blablablabla -c'est du vécu !), et quelques autres choses que je dirais "de bon sens". Mais aussi des choses qui ne me plaisent pas (vu que les habitudes quotidiennes du monsieur ne sont pas forcément les miennes ni celles que je souhaite, et qu'il y a certaines uniformités conformistes que je ne tiens pas à voir entrer chez moi, entre autre :-P ). Normal.

Didier Pleux cherche à remettre sur le devant de la scène du rôle parental l'autorité. Pas l'autoritarisme qui enferme et brime mais l'autorité juste et bien menée, celle qui guide, pas à pas, qui structure, qui construit. Sans entrer dans les détails perso de ma vie (d'enfant et de maman), je ne peux qu'approuver. Après, l'application concrète est forcément modulable d'une famille à l'autre, même si les grandes lignes restent les mêmes, et ce livre me semble une excellente approche pratique. Même dans le cas de figure hors sujet de l'autimse, j'ai pu y puiser des idées intéressantes, alors je ne doute pas qu'il en soit de même pour tous. (pour autant, ATTENTION, ceci s'adresse à des famille dont l'enfant n'a AUCUN autre trouble grave avéré de type autisme ou dépression, entre autre. Certains conseils me sembleraient même limite dangereux si appliqués tels quels dans un cadre avec autisme).

Je me suis bien amusée, dans la première moitié qui permet l'identification de la tyrannie, à reconnaître Untel dans tel détail, Machin dans tel autre (y compris moi-même), et tel comportement, typiquement Truc !! Du coup, comme c'est "vécu", on comprend mieux ce que peut signifier la cohérence de l'ensemble de ces traits de caractère ou de comportement réunis en une seule personne.

J'ai aussi identifié, à quelques moments précis, des propos qui, mal compris-digérés-interprétés, avaient manifestement inspiré une certaine personne qui nous a causé de méchants tracas il y a quelques années en provoquant volontairement des frustrations gratuites et vides de sens, uniquement destinées à "apprendre la frustration". Comme quoi, il n'y a pas que les propos de Dolto, que Didier Pleux remet en cause, qui soient facilement mal interprétables et puissent donner lieu à des aberrations éducatives...

En bref : dans l'ensemble un livre très intéressant, qui peut permettre une mise en pratique rapide si on le juge nécessaire chez soi. Et à titre individuel, un livre qui m'a fait plaisir à lire plus d'une fois par le contre-pied qu'il prend parfois de certaines lourdes tendances actuelles.

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Feuilletons ensemble quelques extraits :

En fait de rencontre, nous ne savions plus rien sur nos amis après leur départ. Ce qu'ils faisaient, ce qu'ils vivaient, ce qu'ils aimaient, tout tournait autour de leur progéniture, leurs enfants les avaient annulés en tant que personnes.

"Il y avait une harmonie logique entre société, mariage et éducation de l'enfant? C'est un paradigme holiste qui, aujourd'hui, a été récusé. La nouvelle société, celle dans laquelle nous vivons, se fonde désormais sur l'individu. C'est le bonheur individuel qui est la fin ultime de chacun." Nous sommes en plein accord avec cette réflexion de Louis Roussel qui ne peut que nous stimuler, nous les parents, à réintroduire au quotidien quelques valeurs altruistes soi-disant désuètes.

Toujours cette fameuse résilience qu'invoque Boris Cyrulnik : l'humain est beaucoup moins fragile qu'on ne le croit. Il est beaucoup moins "psychologiquement déterminé" par les expériences précoces de son milieu familial ou de son environnement qu'on a bien voulu nous le faire croire.

La crise d'adolescence demeure, selon moi, mythique dans ses excès de définition. En revanche, la crise de certains adolescents ou enfants tyrans adolescents apparaît désormais non seulement comme une problématique adulte mais plus précisément comme la conséquence de cette problématique avec sa marque d'une carence éducative : l'intolérance aux frustrations.

Nous appelons distorsion cognitive cette faculté que nous avons tous de ne plus nous servir de nos capacités de raisonnement dans des contextes émotionnellement chargés. Notre intelligence émotionnelle cède bien souvent le pas devant des pensées totalement exagérées ou fausses, hors réalité, en tout cas irrationnelles.

Avant de remettre en question vos croyances irrationnelles -c'est l'objet du prochain chapitre-, il était nécessaire de bien savoir évalur les liens entre nos pensées, nos émotions et nos réponses éducatives. Gérer son émotionnel, vous l'avez compris, ne consiste pas à comprendre le pourquoi de nos réactions, ni à chercher bien loin un quelconque évènement passé déclencheur. Beaucoup plus prosaïquement, nous vous proposons de prendre conscience des cognitions, des petites voix intérieures qui accompagnent les situations éducatives activantes.

Nous, parents, devons travailler nos propres attentes, exigences et demandes pour ne pas majorer nos réactions émotionnelles et donc nos comportements. Si l'émotion rend inefficace notre volonté éducative, il nous appartient de l'atténuer en reconnaissant et en discutant les pensées qui lui sont profondément attachées. [...] Eduquer c'est d'abord éduquer sa propre philosophie interne.

L'éducation, je le répète encore, est bel et bien le moyen parental, non pas de détruire l'enfance, mais de réajuster constamment l'expérience de l'enfant avec la réalité.

Le meilleur moyen est de simplement évaluer le lien entre la transgression et la sanction : pour une destruction de matériel, une réparation matérielle s'impose, pour des désobéissances qui signent un manque de maturité, des restrictions de liberté peuvent être adéquates, pour des résultats piteux à l'école, le rattrapage comblera les retards, pour des grossièretés ou conflits verbaux, la rupture de communication est logique, etc.

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De l'enfant roi à l'enfant tyran, Didier Pleux, 2002, 275 pages

De l'enfant roi à l'enfant tyran, de Didier Pleux

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