L'histoire : Heillange, l'est de la France industriellement sinistré, 1992, 1994, 1996 et 1998. On suit les parcours quotidiens et croisés d'Anthony, de Hacine, de Stef... Des jeunes gens adolescents, un peu perdus, un peu abandonnés à eux-mêmes par des parents dépassés, fatigués, usés par la vie. Ados donc, qui rêvent tous de partir ailleurs, de fuir, de réussir, qui rêvent tous d'amour aussi...

Mon avis : entre l'agressivité permanente, le langage narratif par pointes similaire à celui des protagonistes mal embouchés, ces histoires de petits branleurs sans morale, j'ai vraiment eu du mal à m'intéresser à l'histoire au début. Mais je me suis accrochée, et j'ai bien fait, parce qu'il y a quelque chose de vraiment intéressant dans ce roman, une histoire de dérive pathétique, la vie comme un rouleau compresseur avancé au bulldozer, inéluctable, ravageur silencieux. Un roman du réel. Trop réel peut-être, pas mal cru (y compris dans les descriptions de scènes sexuelles détaillées comme aucune autre scène dans le roman), parfois complaisant, et ça donne un côté vraiment vivant à l'ensemble, presque un témoignage, un documentaire, en tout cas une des teintes possibles de la réalité du terrain, le revers de la médaille des politiques modernes qui vident les usines, partant les villes, et le sens de la vie des ouvriers, ces minuscules engrenages de la société qui se décide ailleurs. Il y a d'ailleurs plusieurs tirades politiques assez intéressantes et bien tournées, clairement marquées "à gauche", même si ça reste conformiste dans l'ensemble. Et puis c'est un roman de la répétition : les enfants ne se rendent pas trop compte, les ados rêvent de partir et d'avoir une autre vie, puis se conforment, rentrent dans le rang, la résignation gagne, l'alcool aussi. Est-ce un bien ? Un mal ? En tout cas c'est comme ça...

Donc un bon moment de lecture, même si, pour autant, je n'ai pas adoré ce livre.

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L'éducation est un grand mot, on peut le mettre dans des livres et des circulaires. En réalité, tout le monde fait ce qu'il peut.

Dès qu'il se savait surpris, le gros homme se ressaisissait et lâchait ce drôle de rire encombré. Elles en avaient fait un gimmick avec Clémence. Héhein... Un rire de poitrine, poussif, QI de cinq, tout en bite.

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Leurs enfants après eux, Nicolas Mathieu, 2018, 430 pages (broché),

Prix Goncourt 2018

Leurs enfants après eux, de Nicolas Mathieu

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