Les Choses humaines, de Karine Tuil

L'histoire : dans la famille Farel, tout ne va pas bien. Les parents viennent de se séparer. La mère, Claire, essayiste féministe, est partie vivre avec son amant, Adam Wizman, un enseignant juif désormais au chômage, à l'histoire complexe aussi. Le père, Jean, journaliste politique de télé et radio très connu, ne vit que pour son nombril, son métier, son image, sa réussite. Leur fils Alexandre est parti loin, pour étudier aux Etats-Unis, à Stanford. Tout cela est sur le fil en permanence, caché juste ce qu'il faut, chacun à la limite du respectable toujours, et puis un jour, une accusation va venir tout bouleverser...

Mon avis : un livre coup de poing, très construit, qui va crescendo. On commence avec une magistrale galerie de portraits, chaque protagoniste nous est décrit en détail, on connaît son passé, sa manière de penser, d'avancer, on saisit grosso modo sa manière de concevoir la vie. La plume est factuelle, un peu piquante parfois, elle n'épagne ni le milieu du journalisme ni le milieu juif orthodoxe ni le milieu féministe. On se demande bien d'où va venir le coup annoncé en 4ème de couverture... Sur qui la foudre va-t-elle s'abattre ? On voit plusieurs candidats potentiels, on a nos préférences. Et puis quand cela arrive, on est surpris (ou pas) de la façon dont ça vient, au début on n'y croit pas, on se dit qu'il va y avoir d'autres ressorts. Et puis finalement, le lecteur aussi se fait emporter dans un tourbillon, le roman le soumet maintenant à un suspens terrible. Comment les choses vont-elles tourner ? Quels arguments vont faire mouche ?... Je vous laisse le découvrir par vous-mêmes.

C'est un roman tout à la fois passionnant et énervant, qui pousse à réfléchir sur notre société, sur les relations humaines en son sein, la place de chacun, qui interroge les principes de la justice, qui pose aussi en filigrane la question de la vérité et de la façon dont elle se construit, avec bonne ou mauvaise foi, sur un détail ou un autre, la question aussi de la valeur et du sens du chatiment. Et tellement d'autres thèmes, que chacun y verra suivant ses intérêts. Un roman d'une richesse inouïe ! A dévorer sans modération !

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L'incipit et quelques extraits...

Elle s'était si souvent retrouvée dans des situations désagréables, voire franchement menaçantes, qui l'obligeaient à trouver en elle les ressources de dire non, d'esquiver et de tenir tête sans vexer celui dont le comportement l'avait offensée ou dépréciée et dont elle ne savai tpas s'il alalit se venger - et de quelle manière. Comme toutes les femmes, elle avait appris à ruser et à mettre les formes, à se dérober, à appréhender l'espace public pour moins le redouter, elle avait dû s'adapter et élaborer des stratégies d'évitement.

Vivre, c'était s'habituer à revoir ses prétentions à la baisse.

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Les Choses humaines, Karine Tuil, 2019, 342 pages,

Prix Interallié 2019,

Prix Goncourt des lycéens 2019