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Chez Plouf
25 mai 2015

La ballade de Lila K, de Blandine Le Callet

livre_blandine le callet_la balade de lila k_2015 05

L'histoire : on découvre Lila quand elle arrive au Centre. Elle a 6 ans, porte de graves cicatrices, ne parle plus, ne supporte pas la lumière, ni qu'on la touche, ni la nourriture... Petit à petit, au Centre, on va l'éduquer, la faire manger, la ramener le plus près possible de la normalité... et petit à petit, par ce récit à la première personne, elle va nous raconter son histoire, ses émotions, ses raisons, sa vie. On découvre rapidement qu'on est dans le futur, dans les années 2100, et à Paris-en région parisienne. Dans un siècle. Ici, pas loin. Un avenir bien familier... Tout comme Lila !

 

Mon avis : formidable ! J'ai adoré le personnage de Lila, si réel, si familier, si juste dans ses sensations, ses dégoûts, ses difficultés avec l'autre. J'ai reconnu comme si je le connaissais ce monde dans lequel elle vit, qui déforme ce qui est "raisonnable" et juste, cette ville grouillante (j'ai adoré avoir des nouvelles de Paris dans un siècle !), cette société d'Etat qui prétend faire notre bien et le savoir mieux que nous-mêmes, coûte que coûte, et verrouille tout sous des prétextes fallacieux, ce troupeau humain qui avance dans la peur, sans trop oser remettre en cause, se convainc à peu de frais. J'ai aimé la réflexion sur ce qui importe, sur la liberté et la sécurité, sur les dérives de notre monde, sur l'individu en tant que tel dans une société pensée pour la masse, sur la normalité, sur l'amour et ses conditions, j'ai aimé aussi le petit côté science fiction mais à peine, tellement crédible, tellement là, au bout des doigts... et tellement flippant ! Quelle graine poussera parmi toutes celles que nous semons aujourd'hui, qui ne sont pas toujours bien jojo ?... Vraiment, j'ai adoré ce livre tout en simplicité, en pudeur, qui véhicule des choses parfois difficiles avec une grande sérénité, une grande sagesse, une humanité un peu froide mais sans borne ! Et j'ai adoré la projection sociale en arrière plan, avec tout ce qu'elle véhicule en idées politiques, et qui sont d'ores et déjà aujourd'hui, en partie, mises à mal.

 

***

Feuilletons ensemble quelques extraits...

 

Alors, j'obéissais : chaque jour, j'apprenais un poème,parfois deux. Ca ne me demandait aucun effort. Je retenais sans peine. J'ai toujours été très spongieuse.

 

Pour mes dix ans, M. Kauffmann m'a offert une boussole, un modèle très ancien et très beau ayant appartenu à son arrière-grand-père. Pour t'aider à trouver ton chemin dans la vie, a-t-il déclaré en me la déposant dans le creux de la main. - Dites donc, la métaphore est un peu usée ! Vous auriez pu trouver autre chose. - Si elle est usée, c'est qu'elle a fait ses preuves, a-t-il rétorqué avec un grand sourire.

 

- Comment dites-vous que ça s'appelle ?

- Un livre. C'est ce qu'on avait, avant les grammabooks.

- Et... qu'est-ce qu'il y a écrit là-dedans ?

- Cela dépend du livre.

J'ai ouvert des yeux ronds. Je n'y comprenais rien.

- Laisse-moi t'expliquer : tu vois, avec un grammabook, on n'a qu'un écran vierge sur lequel vient s'incrire le texte de ton choix. Un livre, lui, est composé de pages imprimées. Une fois que le texte est là, on ne peut plus rien changer. Les mots sont incrustés à la surface. Tiens, touche.

J'ai posé la main sur la feuille. J'ai palpé, puis j'ai gratté les lettres,légèrement, de l'index. M. Kauffmann disait vrai : elles étaient comme prises dans la matière.

- Ca ne peut pas s'effacer ?

- Non, c'est inamovible. Indélébile. Là réside tout l'intérêt : avec le livre, tu possèdes le texte.

 

Du pipeau ! s'est-il mis à beugler. La censure qui se drape dans le principe de précaution !

 

Avec ça, tu devrais pouvoir faire illusion en toutes circonstances. Car c'était bien de cela qu'il s'agissait : faire illusion. Ce que j'étais au fond ne comptait pas vraiment, du moment qu'en surface, tout demeurait conforme.

 

Tous les week-ends, j'allais courir sur la coulée verte,à l'emplacement de l'ancien périphérique. La présence des promeneurs et des autres coureurs m'angoissait si fort que, les premières fois, j'ai rebroussé chemin dès la porte Dauphine.

 

J'aime le noir : l'espace qui s'annule, les objets qui s'effacent, et cette douceur qui tombe sur les yeux, les apaise, les nettoie des scories de lumière que le jour y dépose.

 

On passe sa vie à construire des barrières au-delàdesquelles on s'interdit d'aller : derrière, il y a tous les monstres que l'on s'est créés. On les croit terribles, invincibles, mais ce n'est pas vrai. Dès qu'on trouve le courage de les affronter, ils se révèlent bien plus faibles qu'on ne l'imaginait. Ils perdent consistance, s'évaporent peu à peu. Au point qu'on se demande, pour finir, s'ils existaient vraiment.

 

Pour moi, il n'y avait qu'elle. L'intuition était bonne : Lila K, née de père inconnu et d'une mère enfant trouvée. Mon arbre généalogique ne ressemble pa sà grand-chose, il faut bien le reconnaître. Deux rameaux coupés court. Le destin a eu la main lourde, côté sécateur.

***

2010, 221 pages édition numérique, 394 pages édition brochée

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Commentaires
P
Le K me faisait résister mais après avoir lu une telle cririque, comment veux-tu que je regimbe ?
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I
Coucou !!<br /> <br /> Merci pour ton post ...je suis déjà passionnée par ce que tu viens de mettre alors j imagine si je l achète !! à bientot
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A
C'est fou parce que quasiment que je viens chez toi, j'y trouve un livre que j'ai envie de lire!<br /> <br /> Mais bon, ça doit être de la SF si le périf est remplacé par une coulée verte!!!:)
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Z
Il est dans ma liste à lire...<br /> <br /> En ce moment je fais des échanges sur Babelio ce qui fait bouger un peu ma pile à lire également !
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T
Ok je note, je note
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