Cinq jours, de Douglas Kennedy
L'histoire : Laura, la quarantaine un peu désenchantée, mariée ternement, maman d'un grand gars qui a déjà quitté le nid et d'une ados au lycée, est technicienne dans un centre de radiologie de Damariscota. Un week-end, elle part suivre des conférences. C'est l'occasion de se changer les idées, pense-t-elle. Elle ne croit pas si bien dire ! Elle y rencontre Richard, terne vendeur de polices d'assurance, qui s'avère surprenant. Une rencontre qui va tout changer !
Mon avis : j'avais besoin de me détendre, je me suis dit qu'un Douglas Kennedy serait parfait. Pourtant, j'avoue que je me suis un peu ennuyée, et que j'ai été déçue, j'avais un meilleur souvenir de cet auteur. L'histoire est plutôt sympathique, mais je doute qu'elle méritait tant de pages. Les personnages sont un peu plats, même si tout à fait crédibles. Le récit manque de pétillement, reste très descriptif (quelle que soit la focalisation du narrateur), distant. Pas d'emportement, pas de palpitations. Dommage. Pas désagréable, mais j'ai mis 2 semaines et demie à le lire, ce qui chez moi est assez révélateur d'un ennui (mais allez savoir pourquoi, j'avais décidé que je le terminerais, donc même si j'ai hésité à le lâcher plusieurs fois, je suis allée au bout !). La "leçon" à en tirer est un peu mièvre, porteuse de désenchantement, d'un pseudo-réalisme teinté de pessimisme et de renoncement qui me laisse assez perplexe, dubitative sur les intentions de l'auteur et mes propres perceptions de ce roman. Cependant, comme le thème est éternel et universel, il permet la comparaison avec d'autres romans du même style (genre Madame Bovary, pas du tout au hasard) et apporte quelque chose de vraiment intéressant dans cette perspective de comparaison.
***
Feuilletons ensemble quelques pages...
page 85 : Ce qui me plaît ici, c'est que nous connaissons presque tout de la vie de nos voisins mais nous donnons sans cesse l'impression que cela ne nous intéresse pas. Curieuse ambivalence des natifs de ces contrées : si nous sommes aussi curieux que n'importe qui de ce qui se passe chez les autres, nous mettons un point d'honneur à ne pas le manifester.
page 111 : C'est au cours de cette dernière scène que je me suis aperçue que je pleurais. Etait-ce parce que, à l'instar du personnage joué par John Wayne, j'éprouvais le désir de "rentrer chez moi" mais que ce foyer n'était peut-être qu'un idéal abstrait, sans rapport avec la réalité ? Est-ce que nous rêvons tous d'une maison autre que celle que nous habitons ?
page 118 : Pleind e gens sont heureux en mariage. Evidemment, un grand nombre se disent heureux en couple parce qu'ils ne pourraient pas reconnaître le contraire.
page 130 : - C'est le problème, quand on veut caser une répartie spirituelle : ça vous attire toujours des ennuis.
page 177 : - [...] on ne peut jamais protéger entièrement nos enfnts du danger... ou d'eux-mêmes.
- Même en le sachant, ça n'empêche pas de se sentir coupable, c'est un sentiment inhérent à la condition de parent.
page 194 : - "Changer", a répété Richard. Ce mot qui fait tellement de mal en prétendant apporter le bien.
page 222 : Nous avons dépasser la société de consommation pour tomber dans la société de l'encombrement.
page 231 : "Quand le moment sera venu" : c'est vraiment le propre de la jeunesse, d'ignorer qu'il y a ensuite un âge où le temps s'accélère de manière vertigineuse, féroce.
page 295 : C'était là, au bord du Charles, qu'une colonie avait jadis été établie, de laquelle était née une ville et toute une nation, avec les centaines de milliers d'histoires individuelles attachées à ceux qui avaient vécu ici au cours des siècles. Des histoires pour la plupart disparues avec leurs acteurs, mais, aussi éphémère que soit la vie humaine, elle mérite d'être vécue pleinement. Aucune histoire personnelle n'est insignifiante. Chaque existence est un roman en soi, et même si nous avons du mal à l'admettre, chacun de nous détermine en grande partie la progression du récit, les renversements de situation.
page 344 : Alors pourquoi proférer une banalité du style "la vie n'est pas juste" ? En général, c'est nous qui sommes injustes envers nous-mêmes, la voilà la vérité.
***
Cinq jours, Douglas Kennedy, traduit de l'américain par Bernard Cohen, 2013, 364 pages